Si l’on commence à jeter des cailloux sur les premiers de cordée, c’est toute la cordée qui dégringole » se lamentait Emmanuel Macron, le 15 octobre 2017. Celui qui du haut de sa gloire présidentielle allait porter la bonne parole au peuple mécréant par le biais d’une chaîne privée, la cul-truelle TF1, cherchait à justifier la théorie du ruissellement qui veut que de moins taxer les plus riches leur permet d’investir et de créer de l’emploi.
Si objectivement la cordée d’alpinistes ne résonne pas du cliquetis des chaînes d’une colonne d’esclaves, les alpinistes n’en sont pas moins enchaînés, ou plutôt encordés. Et si pour eux, il en va de leur sécurité, pour les citoyens que nous sommes supposés être, il en va de notre… liberté. Vous savez ! Cette valeur capitale de l’Empire. Érigée, monumentale, à l’entrée de la nouvelle York sous forme d’un totem éclairant le monde. Celle qui n’est pas négociable. Du moins tant qu’il s’agit de l’intérêt des entreprises, des créateurs de richesse et autres privilégiés du système. Quand elle concerne le fainéant qui ne sait rien faire, par contre, là, elle se limite à pouvoir s’enchaîner “librement” au premier de cordée, lui qui est déjà bien bon de l’accepter à sa suite, et à l’escorter bien docilement. « Les prolétaires n’ont rien à perdre que leurs chaînes », plus d’un siècle et demi plus tard, il n’y a malheureusement pas grand-chose à dépoussiérer à la fameuse sentence du Manifeste du Parti Communiste.
Ainsi, dans cette vision éminemment conservatrice et obsolète, et qu’une armada de communicants s’échine à rendre innovante, le premier est le seul à décider du chemin à suivre. On peut le concevoir dans le monde alpin, c’est sujet à caution dans une société qui se veut démocratique. Le riche, le créateur de richesse, celui qui réussit, conduit ceux qui ne sont rien, les fainéants. Pourquoi ? Pourquoi lui ? Pourquoi pas le fainéant ? Ou le paresseux ? Comme s’il n’y avait pas à en débattre ! Débattre de ce que l’on met derrière les termes richesse ou réussite. Comme si tout le monde l’entendait, et devait impérativement l’entendre, de la même manière. Comme formaté au même moule idéologique. Comme si quelqu’un devait forcément conduire quelqu’un d’autre. Comme si la coopération n’avait pas fait les preuves de son efficacité…
Pas plus d’ailleurs que n’est interrogé le chemin suivi par la cordée. À aucun moment. Et si elle faisait fausse route ? Pire, si sa trajectoire se révélait dangereuse pour l’humanité ? Serait-ce si préjudiciable qu’elle en vienne à dégringoler ? Personnellement, et dans la mesure où nous sommes dans la parabole, je réponds, sans hésitation, non. Qu’elle dégringole. La société n’a que faire des nuisibles !
Encore que quelques amis écologistes pourraient s’élever là, et me reprocher de porter un regard négatif sur une espèce qui ne saurait être tout à fait nuisible… puisqu’elle existe. Ça se discute, en effet…